Un nuage d'incertitudes
Guillaume CONSTANTIN
12 mars - 29 avril 2011
Galerie Bertrand Grimont - PARIS
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"Un nuage d’incertitudes était le titre d’un article de presse évoquant le nuage de cendres issu de l’éruption d’un volcan islandais qui a mis à mal une partie du trafic aérien européen en avril et mai 2010. Un de ces incidents incontrôlables et imprévisibles comme un autre rappel de notre vulnérabilité face à ceux-ci."
Extrait de l’entretien réalisé en février-mars 2011
François Aubart : D’où vient le titre de cette exposition ?
Guillaume Constantin : C’était le titre d’un article de journal à propos du nuage de cendres provoqué par l’éruption d’un volcan islandais qui a perturbé le trafic aérien européen en avril et mai 2010. C’est le genre de titre fabriqué, au « catastrophisme calculé » avec une symbolique presque anecdotique, voire fictionnelle qui reste malgré cela assez évocateur et mystérieux lorsqu’on s’y arrête un peu.
François Aubart : En fait j’ai aussi l’impression que ce titre peut être lu comme une définition de ton travail puisqu’un nuage est quelque chose de mouvant dans sa constitution même. Par ailleurs un nuage c’est aussi un « tag cloud » fait d’un ensemble de mots clés liés et éparpillés qui composent une identité. Qui plus est, le nuage que tu évoques est fait d’incertitude ce qui me paraît proche de ta façon d’opérer. Souvent tes productions deviennent des sortes de motifs que tu réemplois dans différents contextes et qui peuvent ainsi passer d’un matériau à un autre. Est ce que c’est une raison pour le choix de ce titre?
Guillaume Constantin : Un nuage est quelque chose d’assez paradoxal. Ce n’est pas évident d’imaginer que c’est une grande quantité d’eau en suspension dans l’atmosphère qui change d’aspect selon les circonstances. C’est donc quelque chose d’apparemment très simple mais qui est en réalité assez complexe. Ce caractère mouvant m’intéresse beaucoup en effet.
J’ai aussi choisi ce titre pour les dysfonctionnements produits par ce nuage de cendres. Comme une métaphore de mon travail : une pratique tout en dysfonctionnement, en fragilité, en instabilité, truffée de références mortuaires plus ou moins directes comme par exemple une réplique en noir sur noir d’un catalogue des Blacks Paintings d’Ad Reinhardt (1), l’extinction de plus de lumière, un néon de Claude Lévêque qui reprend Goethe (2), de faux néons qui ne fonctionnent pas (3) ou encore les everyday ghosts (4).
Je souscris complètement à ton idée de tag cloud, un nuage de mots- clés, ça me semble assez juste, car ce que je fais sont des combinaisons d’éléments qui gravitent ensemble et se relient à un endroit et à un moment donnés. Tu évoques des mots-clés, je pourrais ajouter des « matériaux-clés » qui définissent très bien la notion de motifs. Des matériaux qui s’assemblent, qui se confrontent mais pas toujours de manière très contrôlée. Ma pratique se définit beaucoup plus maintenant par ce jeu-là que par sa relation à la fragilité ou par rapport à la mort.
1. Print it black, 2008, impression laser noire sur papier canson noir 28 × 20cm (format fermé). Reproduction intégrale du catalogue Black paintings (1970) d’Ad Reinhardt.
2. Plus de lumière (reprise), 2007, plexiglas, câbles électriques, carton, supports en pvc. Reprise du néon de Claude Lévêque (1999).
3. Let’s just imitate the real until we find a better one, 2009, plexiglas peint, carton plume noir, supports acryliques, câbles électriques et prise murale. 400 × 200 cm. Imagination aveugle, 2011 plexiglas, peinture phosphorescente, supports acryliques, silicone, 90 × 30 cm.
4. Veille d’écran téléchargeable Everyday ghosts réalisée pour la revue Hypertexte n°3"